Quels émetteurs pour une chaudière à condensation ?
Les chaudières à condensation permettent de faire jusqu’à 30% d’économies d’énergie par rapport aux anciennes chaudières à fioul ou à gaz. La performance énergétique de ces équipements varie cependant avec la nature de l’installation de chauffage central, et en particulier avec la température du circuit d’eau. Or la plupart des installations de chauffage central existantes ont été conçues pour fonctionner avec des boucles d’eau à » haute température » et de sempiternels radiateurs en fonte. Du coup, dans l’existant, la chaudière à condensation est-elle toujours une solution pertinente en remplacement de chaudière ?
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Pour aborder cette question, Quelle Energie revient sur l’influence des différents types de corps de chauffe, ou « émetteurs de chaleur », pour être précis, sur le rendement des chaudières à condensation. Nous passerons donc en revue le cas des traditionnels radiateurs en fonte « haute température », des plus récents radiateurs dits à « basse température » ou » chaleur douce », sans omettre les plus favorables planchers chauffants. Au préalable, un petit détour par les fondamentaux permettra de fixer les idées.
De l’eau dans le gaz ?
Comme chacun sait désormais, l’utilisation de combustibles, fossiles ou non, génère du gaz carbonique et fait couler beaucoup d’encre. Mais leur combustion produit également de la vapeur d’eau, en raison directe de la teneur en hydrogène liée à leur composition chimique. Le gaz naturel contient ainsi près de 24% d’hydrogène en masse, le mazout ou fioul domestique environ 13%. A titre de comparaison, le propane et le butane en contiennent environ 16%, le bois 6% et le charbon moins que cela. L’amélioration des chaudières à condensation consiste donc à convertir cette part de vapeur en eau liquide, de manière à récupérer la chaleur de changement d’état.
En pratique, dans les chaudières à condensation (voir schéma ci-contre), les fumées sont conduites vers une seconde chambre où un condenseur liquéfie la vapeur d’eau contenue et refroidit davantage les fumées évacuées. L’eau se condense ainsi au contact de la conduite d’eau de retour du circuit de chauffage et lui transfère sa chaleur de vaporisation, soit quelque 0,7 kWh de chaleur par litre d’eau condensé. Le gain énergétique associé, et donc l’économie de combustible induite, est au maximum de 11% pour les chaudières gaz à condensation et de 6% pour les chaudières fioul (intégralité de la vapeur condensée).
Mais la condensation ne commence à se produire que pour des températures de retour de circuit d’eau inférieures à la température dite « de rosée ». Celle-ci est de l’ordre de 55°C pour les chaudières gaz et de l’ordre de 50°C pour les chaudières fioul.
De la raison des chiffres…
Au vu de ce qui précède, la condensation sera d’autant plus complète et le rendement plus élevé que la température de retour du circuit de chauffage sera inférieure au point de rosée. La courbe ci-contre* (cas du générateur au gaz naturel) illustre ainsi le gain en performance dû à la condensation (à gauche du point de rosée).
Rappelons encore le petit artifice qui permet d’afficher des rendements supérieurs à 100%. Par convention, le contenu énergétique des combustibles est déterminé en considérant que l’eau est produite sous forme gazeuse. C’est ce qu’on appelle le pouvoir calorifique inférieur ou PCI. Les fabricants de chaudières ont donc imaginé de rapporter le gain lié à la liquéfaction de l’eau à cette référence qui n’en tenait pas compte, ce qui leur permet d’afficher des rendements en apparence extraordinaires. Cette pratique est d’autant plus fallacieuse que les tarifs publics du gaz sont libellés en pouvoir calorifique supérieur (PCS)**, qui suppose que l’eau est produite à l’état liquide.
…aux vertus des émetteurs
Mais venons-en aux différents cas de figure concernant les émetteurs de chaleur. Les chaudières à condensation atteignent leur pleine performance avec les circuits d’eau les plus proches de la température ambiante. Elles sont donc particulièrement adaptées aux planchers chauffants basse température, avec des retours d’eau inférieurs à 30°C. Nous nous trouvons alors à l’extrémité gauche de la courbe et proches du rendement maximal.
Les radiateurs à » basse température », pour leur part, fonctionnent typiquement en régime 70/50°C. Une température de retour de 50°C est donc à peine suffisante pour débuter la condensation dans le cas du fioul, tandis que pour le gaz naturel, le gain plafonnera à 5% de rendement en régime stationnaire.
Dans le cas, enfin, des circuits » haute température », le régime de température est typiquement de 90/70°C. La température de retour, généralement supérieure à 60°C, n’occasionne alors aucune condensation, hormis lors des phases de démarrage (cas d’une reprise de chauffage après réduit de nuit, par exemple). Si bien que le gain de rendement lié à la condensation est tout à fait marginal.
Les solutions
Dans l’habitat existant, le chauffage central avec des radiateurs en fonte « haute température » impose a priori des températures de boucle d’eau supérieures à 60°C, qui s’avèrent inadéquates pour atteindre les performances optimales des chaudières à condensation. De plus, pour les radiateurs situés le long des murs extérieurs, ces derniers se retrouvent à près de 50°C auprès des radiateurs et conduisent une part généreuse de ces calories vers l’extérieur. Reste que les chaudières se sont beaucoup améliorées, et que le potentiel d’économie reste généralement supérieur à 15% en remplacement d’un équipement de plus de dix ans, même en l’absence de condensation.
La solution radicale est de remplacer les radiateurs en fonte par des émetteurs à basse température volontairement surdimensionnés, radiateurs ou planchers chauffants selon les possibilités. Cette stratégie consiste à augmenter significativement la surface d’échange des émetteurs, de manière à pouvoir baisser d’autant la température du circuit d’eau. Une étude thermique permettra d’ajuster précisément les matériels au besoin du logement.
Le surcoût par rapport au simple remplacement de chaudière n’est pas négligeable, mais il sera largement et rapidement récupéré par les économies réalisées. Rien n’empêche également, à ce titre, de rajouter des radiateurs basse température à une installation existante, sans remplacer l’ensemble des radiateurs existants, ce qui limitera l’investissement.
Une autre méthode est d’installer un programmateur de chauffage avec sonde extérieure. La » courbe de chauffe » est ainsi liée à la température extérieure (voir diagramme*** ci-contre), avec une programmation de température d’eau en départ de chaudière d’autant plus haute que l’ambiance extérieure sera fraîche.
En haute saison de chauffe, lors des jours les plus froids, le rendement pour un circuit » haute température » sera sensiblement identique à ce que produirait une chaudière basse température. Le phénomène s’applique tout autant aux circuits basse température : une température de retour supérieure à 55°C invalidera de même tout gain énergétique lié à la condensation. En revanche, au cours de l’intersaison, soit pour la majorité des jours de chauffe dans le cas général, la température d’eau pourra être abaissée sous le point de rosée, de sorte à bénéficier alors du gain de rendement de la chaudière à condensation et à améliorer nettement la performance saisonnière de l’installation.
Mais la meilleure solution reste, à double titre, de changer de stratégie en limitant si possible le besoin en amont. Il s’agit tout simplement de renforcer l’isolation du logement et de gagner ainsi sur deux tableaux. D’une part le besoin de chauffage s’en trouvera réduit et générera autant d’économies directes. De l’autre, la température d’eau pourra également être abaissée, sans rien changer aux émetteurs existants, avec un niveau de confort accru, une chaudière de moindre puissance et une performance supérieure. Les nouvelles incitations fiscales sont d’ailleurs orientées en ce sens. Elles permettent de bénéficier de 25% de crédit d’impôt en cas de bouquet de travaux. De quoi condenser en toute sérénité !
Sources
* Chaudiere-leguide.com
** Ademe.
Tarif janvier 2014 : 6,62 €/100 kWh PCS, soit 7,36 €/100 kWh PCI (prix moyen abonnement compris en tarif B1).
*** Thermexcel.com